Contre le bruit, pourquoi pas le même combat ?

Odile Salomé, vice-présidente du collectif contre les nuisances aériennes.

Odile Salomé, est la Vice-Présidente du collectif contre les nuisances aériennes. Elle explique ici pourquoi, selon elle, les 15 000 manifestants contre la création d'un deuxième aéroport dans banlieue toulousaine sont dans l'erreur.
Votre association dénonce les nuisances aériennes. Et vous êtes favorable à l'ouverture d'un deuxième aéroport près de Toulouse. C'est étonnant, non ?
Au contraire. Je crois que les gens du Frontonnais ont bien compris ce qu'on subissait : les réveils nocturnes, la fatigue... La situation est grave en terme de sécurité et de santé publique. On s'achemine d'ailleurs vers un scandale du type de celui de l'amiante, d'autant plus qu'à Toulouse, 100 000 personnes, onze écoles, deux collèges, quatre lycées et deux écoles supérieures sont concernées par le plan d'exposition au bruit autour de l'aéroport. Alors je pose la question, que vaut-il mieux ? Déménager 100 000 personnes ou créer un deuxième aéroport sur une zone où il ne faudra déplacer que 3 000 personnes ?
Et pourquoi ne pas limiter le nombre de mouvements dans le ciel toulousain en déplaçant certains vols sur de petits aéroports de la région ?
C'est une solution proposée par certains élus, mais çà ne sera pas suffisant. On a aujourd'hui 100 000 mouvements à Toulouse avec un plan d'exposition au bruit qui prévoit 140 000 mouvements en 2010 et175 000 en 2020. On est l'aéroport le plus nuisant de France après Orly et avant Roissy si on regarde le plan de gêne sonore. Si donc, il y a un endroit en France où il faut construire une deuxième plateforme, c'est bien Toulouse.
Mais çà ne changerait rien à notre problème
Si ! Quelle est l'autre solution sinon ? Moi, je veux bien qu'on fasse un grand jardin à la place de tous les immeubles qui vont être détruits avec le GPV et qu'on déménage les gens ailleurs. Mais à priori, ce n'est pas ce qui est prévu. Si par contre, on revient à 30 000 mouvements à Toulouse, le plan d'exposition au bruit se confond presque avec les pistes et les intallations aéroportuaires, ce qui serait un grand soulagement pour les riverains de cet aéroport...
Et un transfert des risques désastreux pour les Frontonnais !
Mais moi je ne sais pas où il faut mettre ce second aéroport. Qu'on me dise que ce sera à Monbéqui, à Rabastens, à Vacquiers, à Fronton... peu importe. Sur ce plan là nous sommes d'accord pour des études appronfondies sur les conséquences. Mais avec un projet ambitieux, réaliste et inventif, il est possible de prévoir une plateforme capable à terme d'accueillir 200 000 mouvements sans que çà ne gêne plus personne contrairement à ce qui se passe aujourd'hui.
Comment est-ce que ce deuxième aéroport ne pourrait gêner personne ?
On parle d'un projet à 20 ans. Je le répète, c'est plus facile de réserver des terrains pour bouger
3 000 personnes et des vignes dans les 20 prochaines que de déménager 100 00 personnes en danger ici. Par ailleurs, en ce qui concerne l'activité agricole, rien ne dit qu'elle soit incompatible avec la proximité d'un aéroport.

Propos recueillis par Béatrice Dillies

 

Lettre ouverte à Mme Salomé
du Collectif contre les nuisances aériennes

Madame, oui les gens du Frontonnais sont conscients de ce que vous subissez mais non les
20 000 manifestants contre le nouvel aéroport ne sont pas dans l'erreur. Ils savent très bien ce que quelques technocrates et affairistes veulent leur imposer. Mais ils sont stupéfaits que vous rejoigniez ce mauvais combat.

Vous parlez de 3 000 personnes à déménager mais vos chiffres sont faux : il y en a bien plus et 100 000 personnes seront touchées par les nuisances, c'est-à-dire autant qu'à Toulouse, car c'est un projet quatre fois supérieur à Toulouse-Blagnac. Que faites-vous de ceux qui ne seront pas "déménagés" ? Voulez-vous les condamner à subir ce que vous refusez pour vous ? Vos arguments sur la sécurité et la santé publiques sont-ils vrais pour les toulousains et faux pour les frontonnais ? Vous parlez de collèges et de lycées, croyez-vous que nous n'en avons pas ? Vous parlez de vignes à déménager, car vous ne savez pas qu'un vignoble AOC ne se déplace pas, il ne s'agira pas de déplacement mais de destruction. Quant à l'activité agricole de qualité de notre territoire, irez-vous, Madame, consommer des productions agricoles cultivées au kérosène et à l'oxyde de carbone ?

Vous rejetez d'une phrase, toutes les possibilités de solutions alternatives parce que vous êtes obnubilée par la fin de Toulouse-Blagnac. Savez-vous que, si vous aviez gain de cause, vous ne serez pas soulagée avant 20 ans? Et d'ici là ? Ne seriez-vous pas satisfaite d'un transfert de mouvements vers les aéroports régionaux, qui le demandent ? D'un transfert de passagers sur le TGV ? Ne seriez-vous pas satisfaite, enfin, que l'État vous protège bien mieux par des réglementations plus sévères envers les compagnies aériennes, par des indemnisations intégrales pour les nuisances sonores, par des rachats à leur valeur de vos habitations si vous souhaitez partir ?

Malheureusement, vous refusez cela en vous focalisant sur un nouvel aéroport n'importe où ailleurs pourvu que ce soit chez les autres. Je regrette d'avoir à vous le dire, mais, madame, est-ce nous qui avons implanté Toulouse-Blagnac et est-ce nous qui avons dit aux riverains d'aller vivre à proximité ? Il est notoire que l'urbanisation autour de l'aéroport de Blagnac s'est développée fortement alors même que l'aéroport existait, les gens sont venus y habiter en pleine connaissance de cause. C'est un choix de vouloir vivre à proximité d'une grande ville avec tous ses avantages, et ses inconvénients.

Nous, nous avons choisi de vivre autrement, nous n'avons pas tous les équipements sportifs, culturels et autres dont bénéficient les habitants de Toulouse, de Blagnac et de l'agglomération. Mais nous avons choisi pour nous et nos enfants une autre vie, plus proche de la nature et de l'environnement, plus calme, plus sereine. Dans notre région, 100 000 personnes ont choisi ce mode de vie, avec ses avantages et ses inconvénients.C'est notre choix de vie, tout aussi respectable que celui des citadins.

Lorsque vos déchets ménagers vous embarrassent, je suis sûr que vous ne les déversez pas dans le jardin de votre voisin, vous trouvez d'autres solutions ; alors battez-vous, Madame, contre les nuisances de Toulouse-Blagnac : ce n'est vraiment pas le même combat que de vouloir vous en débarrasser en l'envoyant chez vos voisins.

Jean-François Rouch Villaudric Secrétaire de l'Union des Villaudricains Contre l'Aéroport

Réponse à Mme Odile Salomé,
Vice-Présidente du Collectif contre les nuisances aériennes.

Je ne suis qu'un simple adhérent de l'Union des Villaudricains contre l'Aéroport, ( membre du Collectif A.C.N.A.T), natif de mon village, et souhaitant y rester jusqu'à la fin de mes jours. Je voudrais répondre à votre article paru dans La Dépêche du Midi qui ici soulève quelques interrogations, c'est le moins qu'on puisse dire !

Oui Mme Salomé, les gens du Frontonnais ont bien compris ce que vous endurez continuellement près de l'Aéroport de Blagnac, mais comment pouvez vous penser que nous pourrions à notre tour subir 4 fois plus de nuisances, puisque c'est 4 fois plus de trafic que l'on nous promet ! Mais j'oubliais c'est vrai que vous voulez nous " déplacer " comme vous dites si bien, comme du bétail qu'on éloigne du danger. C'est plutôt choquant comme solution, et pourquoi pas des "charters" pour nous exiler tant que vous y êtes !

Savez vous Mme Salomé que, la grande majorité des gens qui habitent dans le Frontonnais y sont nés, que beaucoup d'autres y sont venus justement pour trouver la tranquillité de nos campagnes, et que ces gens là font le sacrifice de parcourir tous les jours des dizaines de kilomètres pour se rendre à leur travail ?

Mais ce que vous semblez ignorer le plus, c'est que depuis des générations, à force de sacrifices, de travail acharné, des agriculteurs, des vignerons, qui ont cru à leur pays ont réussi à donner ses lettres de noblesse à un vignoble reconnu par tous et dont ils sont si fiers : l'A.O.C du Frontonnais. Et vous voulez aussi bouger la vigne ? ! Si la situation n'était pas si grave, elle porterait à sourire ! Comment fait on pour déplacer une aire d'Appellation d' Origine Contrôlée ? Faudra-t-il aussi amener la terre pour obtenir de nouveau ce label si convoité ?

Soyons sérieux, il ne s'agit pas le moins du monde d'opposer les gens de Blagnac à ceux du Nord toulousain. Au contraire, il s'agit de trouver des solutions qui contentent les uns et les autres, c'est-à-dire qui diminuent le trafic de Blagnac ; on s'étonne de ne pas voir s'imposer le TGV, comme il a été fait à Marseille par exemple. Demandez aux autorités aéroportuaires de Marignane qui ont vu leur trafic baisser d'une manière très significative, s'ils envisagent de créer un 2ème aéroport ; et je ne parle pas de Lyon Satolas durement touché par la concurrence du rail. Ecoutons les aéroports régionaux de Tarbes et de Carcassonne qui sont demandeurs de trafic. Ne faisons pas l'erreur du "tout avion" ; il n'est jamais bon de mettre tous ses oeufs dans le même panier. (sagesse populaire de nos campagne)

Pour conclure, voyez-vous, nous ne sommes pas comme vous, pour qui importe peu que cet aéroport se fasse à Fronton, Vacquiers, Montbéqui... pourvu qu'il soit chez les autres. Ce n'est pas le même combat que nous menons, et nous le regrettons.

Cet aéroport, nous ne le voulons " ni ici, ni ailleurs " et l'étude que nous demandons prouvera que ce projet " pharaonique "- excusez-moi M Cujives- n'a pas lieu d'être, car inutile, coûteux et inhumain. Il y a d'autres solutions qui existent, encore faut-il avoir la volonté de les envisager.

Au risque de vous décevoir, vous et peut être d'autres, nous ne nous laisserons pas facilement "bouger", c'est une chose certaine.

Roland Doumerg